BANALITE DU MAL et AIR DU TEMPS
Séminaire 2020-2021
Sonia Weber
Si dans Le malaise dans la civilisation Freud écrivait :
« …que demandent les hommes à la vie, et à quoi tendent-ils ? On n’a guère de chance de se tromper en répondant : ils tendent au bonheur » [Puf 1971, p 20]. Mais poursuit-il : « …le bonheur est un problème d’économie libidinale. Aucun conseil n’est valable pour tous, chacun doit chercher par lui-même la façon dont il peut être heureux » [p30], ),
aujourd’hui « le bonheur se construirait, s’enseignerait, s’apprendrait » (cf. Happycratie, de Cabanas et Illouz).
Ce qui est rejeté, récusé, ce sont tous les sentiments / affects « négatifs », et plus généralement tout ce qui entrave l’efficacité, la performance, l’excellence…Il faut au contraire être résilient, rebondir, se réinventer, évoluer, s’adapter. Faire d’un mal un bien. Et porter seul la responsabilité d’y arriver ou pas, quel que soit le contexte.
Être heureux, contents, joyeux, dynamiques, positifs, entreprenants, en privé comme au travail : les règles du « nouveau management » visent à favoriser ces affects qui doivent permettre de faire toujours mieux, même avec moins de moyens. Mais est-ce si nouveau ? La lecture de Libres d’Obéir : le management du nazisme à aujourd’hui peut en faire douter.
Tout cela pour notre Bien, individuel et collectif, notre Sécurité, notre Bonheur !
Mais tous ces beaux discours, ces belles promesses, ne dissimulent-elles pas une violence diffuse et irreprésentable, celle dont parle Lacan dans son séminaire ?
«…les sujets n’ont pas, de nos jours, à assumer le vécu de la haine dans ce qu’il a de plus brulant. Et pourquoi ? Parce que nous sommes déjà très suffisamment une civilisation de la haine. Le chemin de la course à la destruction n’est-il pas vraiment très bien frayé chez nous ? …La haine s’habille dans notre discours commun de bien des prétextes, elle rencontre des rationalisations extraordinairement faciles. Peut-être est-ce cet état de floculation diffuse de la haine qui sature en nous l’appel à la destruction de l’être. Comme si l’objectivation de l’être humain dans notre civilisation correspondait exactement à ce qui, dans la structure de l’ego, est le pôle de la haine » [Séminaire Les Ecrits Techniques de Freud, séance du 7 juillet 1954].
Si la crise « sanitaire » actuelle ébranle sérieusement certaines modalités de la vie collective, sa gestion – Etat d’urgence sanitaire – pour notre Sécurité, ne masque-t-elle aussi une bonne dose de violence diffuse ?
Pour cette année, la question du « mal », dont la violence n’est qu’un aspect, nous retiendra. Nous nous attarderons donc dans ces zones « obscures » « nauséabondes » « impensables » sans fascination, mais sans chercher à minimiser ou à positiver trop vite ce dont il retourne. Nous tenterons de déplier quelques facettes de la question tant d’un point de vue clinique que d’un point de vue sociétal. Et bien sûr nous nous interrogerons aussi sur ce que pourrait être aujourd’hui « la banalité du mal » (Hannah Arendt).
Sur Inscription ! (désolée), afin de pouvoir adapter le lieu.
Sonia Weber sw.visavie@sfr.fr 06 49 14 33 44
Dates : 1ere séance le 5 décembre de 9h15 à 12h30.
Puis les samedis 6 février, 13 mars, 10 avril et 29 mai 2021.
Coût : 50€